La GPA: un enjeu de dignité humaine au cœur des législations européennes

Le 23 avril 2024, une décision législative majeure a été prise par le Parlement européen, suscitant un vif débat autour de la gestation pour autrui (GPA). Cette pratique, consistant en l’engagement d’une femme à porter un enfant pour le remettre dès sa naissance à d’autres personnes, se trouve aujourd’hui au centre des préoccupations éthiques et juridiques. Face à cette polémique grandissante, nous avons sollicité l’expertise de Marie-Anne Frison-Roche, renommée pour ses travaux sur la question.

Une pratique ancestrale sous les feux de la modernité

La GPA n’est pas nouvelle, mais elle se voit transformée par les avancées technologiques et l’émergence de nouveaux droits individuels. Auparavant marginale, cette pratique s’accroît en réponse à des désirs d’enfant insatisfaits naturellement. Le progrès technique permettant désormais de concrétiser ces souhaits, le «désir d’enfant» se mue en un prétendu «droit à l’enfant», exacerbant ainsi la demande pour la maternité de substitution.

L’essor d’un marché face à une offre restreinte

Si le désir d’avoir des enfants est universel et ancestral, celui de porter un enfant pour autrui reste peu répandu. Face à une demande croissante et une offre limitée, des agences spécialisées orchestrent ces rencontres internationales, souvent lucratives, exploitant ainsi le potentiel reproducteur féminin dans un cadre contractuel privé qui interpelle autant qu’il questionne.

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La jurisprudence européenne et la position française

La Cour européenne des droits de l’Homme a déjà eu à se prononcer sur la GPA, notamment en ce qui concerne l’établissement du lien de filiation pour les enfants issus de ces pratiques. Si certaines décisions ont pu faciliter l’établissement d’un tel lien malgré les interdictions nationales, elles soulèvent néanmoins la question du rôle de l’État dans la protection des personnes impliquées.

L’impact juridique et social du texte adopté par le Parlement européen

La directive récemment adoptée place explicitement la GPA dans le champ de la traite des êtres humains. Cependant, son interprétation fait débat : s’il est clair que cela pourrait signifier une interdiction généralisée sur le territoire européen, certains y voient une distinction entre les pratiques contraintes et celles dites «altruistes». Ce point reste crucial car il détermine non seulement l’avenir légal mais aussi éthique de cette pratique controversée.

Dire oui ou dire non : l’enjeu fondamental du choix sociétal

Au-delà des considérations juridiques immédiates, accepter ou refuser la GPA constitue un choix profondément sociétal. Dire oui reviendrait à contractualiser une dimension auparavant régie par des institutions politiques telles que la filiation. Dire non signifierait préserver les principes fondamentaux relatifs à l’indisponibilité du corps humain et à la protection inconditionnelle des êtres humains.